les garanties en matière de construction

En matière de travaux de construction, qu’il s’agisse d’une première construction ou de travaux de rénovation, plusieurs garanties peuvent être actionnées en cas de défauts, de malfaçons ou de difficultés liées à la construction.

Ces garanties constituent un système spécifique au droit français ; elles sont organisées par la loi relative à la responsabilité et à l’assurance dans le domaine de la construction du 4 janvier 1978 (loi 78-12), dite « Loi Spinetta » appliquée depuis le 1° janvier 1979,

Ces garanties sont souvent peu ou mal connues des propriétaires car elles s’enchevêtrent, se juxtaposent, se superposent et surtout ne peuvent jouer que dans des délais précis, d’où les confusions, les erreurs, et les sentiments de victimisation trop souvent répandus.

Que couvrent-elles ? Comment fonctionnent-elles ? Quand les faire jouer ?

Quelles qu’elles soient ces garanties ont un « dénominateur » commun : leur point de départ.

1 – La réception des travaux, point de départ de toutes les garanties liées à la construction :

La réception des travaux marque la fin du chantier. Elle intervient avant l’entrée dans les lieux lorsqu’il s’agit d’une construction neuve, à l’achèvement des travaux en matière de rénovation.

– Pour une construction neuve, c’est le constructeur ou le maître d’oeuvre qui convoquera le maître d’ouvrage pour constater l’achèvement du chantier et vérifier sa conformité avec le projet initial. Les différents artisans et entrepreneurs ayant participé à la construction prendront part à la réception

  • Dans une copropriété c’est le syndic (professionnel ou non) qui réceptionnera en prenant l’avis du conseil syndical, qui lui aura au préalable communiqué ses éventuelles réserves.

La réception peut être faite avec ou sans réserve ; elle donne généralement lieu à la rédaction d’un procès-verbal (PV) en bonne et due forme, co-signé par l’ensemble des présents. Toutefois l’établissement de ce PV n’est pas systématique. La jurisprudence considère qu’il y a réception des travaux « tacite » lorsque le maître d’ouvrage a pris possession de l’ouvrage et que les travaux ont été intégralement payés.

La réception des travaux peut également être refusée par le maître d’ouvrage s’il considère que les travaux ne sont pas achevés à la date qui lui est proposée. Les différents corps de métier devront lui proposer une autre date. En cas de désaccord le maître d’ouvrage pourra saisir le juge des référés pour demander l’achèvement des travaux.

Il sera judicieux d’insérer au contrat de construction une clause spécifique de « retenue de garantie » (loi du 16 juillet 1971) qui permettra au maître d’ouvrage de retenir, pendant un an, 5% au maximum du prix des travaux s’il estime que l’entrepreneur n’a pas remédié aux vices constatés à la réception des travaux. Cette somme doit être remise entre les mains d’un tiers pendant un an, mais le plus souvent elle est conservée par le client.

A noter que les contrats de vente en état futur d’achèvement (VEFA) ne sont pas concernés par cette clause

C’est à partir de la date de réception des travaux que courent les garanties offertes par les différentes assurances-construction

2 – Les garanties en matière de construction :

Ces garanties qui bénéficient aux propriétaires imposent au constructeur de s’assurer pour les couvrir. Ce sont des garanties légales (organisées par la loi) ; elles sont d’ordre public c’est à dire qu’elles sont obligatoires et que toute clause au contrat de construction qui les exclurait ou les limiterait serait nulle.

2.1 – La garantie de parfait achèvement (art. 1792-6 CC) :

A la charge de l’entrepreneur, cette garantie couvre  tous types de désordres :

  • signalés par le maître de l’ouvrage (l’acquéreur, ou, plus généralement, celui pour le compte de qui sont réalisés les travaux) et notés au procès verbal de réception des travaux
  • apparus dans l’année qui suit la réception des travaux et notifiés au constructeur par lettre recommandée avec accusé de réception(LRAR) – (art. 1792-6, CC).

Ces désordres peuvent résulter de malfaçons ou de travaux non conformes à la commande. En revanche cette garantie ne couvre pas les désordres liés à un mauvais entretien de la part du client, à l’usure normale ou à l’usage du bien, ou encore ceux qui n’auraient pas été signalés lors de la réception des travaux alors qu’ils étaient apparents.

L’entrepreneur concerné a l’obligation de procéder aux réparations dans les délais fixés avec le maitre de l’ouvrage. Si les travaux ne sont pas réalisés dans les délais convenus le maitre de l’ouvrage peut saisir la justice dans l’année qui suit la date de réception des travaux afin de demander des indemnités de retard, voire d’obtenir l’autorisation de faire exécuter les travaux par une autre entreprise et d’en exiger ensuite le remboursement auprès de l’entrepreneur défaillant

2.2 – La garantie de bon fonctionnement (dite aussi garantie biennale – art. 1792-3 CC ; et R111-27 et R111-28 du Code de la construction et de l’habitation) :

Elle concerne tous les constructeurs d’ouvrage c’est à dire l’architecte, l’entrepreneur, le technicien, le maître d’ouvrage le promoteur immobilier.

Cette garantie concerne tous les « équipements » c’est à dire tous les éléments qui peuvent être retirés et désolidarisés du bâti sans dégradation ou destruction de celui-ci (ballon d’eau chaude, faux-plafond, volets, chaudière …). Cette garantie ne s’applique qu’aux vices non apparus lors de la réception.

Cette garantie impose à l’entreprise qui a réalisé les travaux de réparer ou de remplacer les éléments d’équipement qui ne fonctionnent pas correctement et dont les défauts de fonctionnement apparaissent au cours des 2 années qui suivent la date de réception des travaux, d’où son nom de garantie biennale.

Pour actionner cette garantie la victime du désordre devra le notifier au plus vite à l’entrepreneur concerné par LRAR, et lui demander d’intervenir à ses frais dans un délai rapide. Si l’entreprise n’intervient pas dans le délai convenu, la victime pourra saisir le tribunal compétent en fonction du montant du litige (Tribunal d’instance -TI- jusqu’à 10.000€ ; Tribunal de grande instance -TGI- au delà de 10.000 €)

Cette garantie est très souvent incluse dans le contrat de vente ou de construction. Elle est de deux ans à compter de la date de réception des travaux, mais certains professionnels proposent à titre commercial d’en étendre la durée à 4 ou 5 ans.

2.3 – La garantie décennale ou assurance de responsabilité civile décennale (art. 1792 et 1792-2 CC):

Elle concerne tous les constructeurs d’ouvrage (entrepreneur, promoteur immobilier, lotisseur, maître d’œuvre, architecte, technicien, bureau d’étude, ingénieur-conseil) impliqués dans la construction d’un ouvrage neuf ou existant. Cela signifie que tout constructeur engage sa responsabilité en cas de dommage à l’égard du propriétaire (maître d’ouvrage) actuel ou futur pendant une durée de 10 ans.

Les sous-traitants sont exclus du champ d’application de la loi car ils n’ont pas de lien direct avec le maître d’ouvrage.

Cette garantie concerne les vices ou dommages de construction

lorsqu’ils affectent la solidité de l’ouvrage et de ceux de ses équipements qui ne peuvent en être dissociés

lorsqu’ils rendent l’ouvrage inhabitable ou impropre à l’usage auquel il est destiné (défaut d’étanchéité ; fissures très importantes…)

Le terme « d’ouvrage » désigne ici le « gros ouvrage » (murs, toiture, charpente) par opposition aux « menus ouvrages (portes et fenêtres…) . Il peut s’agir aussi d’un élément d’équipement lorsque les vices qui l’affectent rendent le bien impropre à sa destination.

Avant l’ouverture du chantier le constructeur devra produire à son client un justificatif du contrat en responsabilité civile décennale qu’il a souscrit pour couvrir cette garantie

Cette garantie pourra être mise en oeuvre dans les 10 ans à compter de la date de réception des travaux

2-4 – L’assurance dommages-ouvrage dite aussi « assurance D-O » :

Cette assurance garantit et assure le coût de réparation des désordres affectant un ouvrage immobilier, lors de sa construction, de son agrandissement ou de sa rénovation.

Elle a été imaginée pour garantir une réparation rapide aux victimes de désordres affectant leur construction.

Cette assurance assure le bien et se transmet donc à ses propriétaires successifs.

Cette assurance est obligatoire. Elle est souscrite par le maître d’ouvrage avant le début du chantier. Son objet est de pré-financer le coût des réparations des dommages dont sont responsables les constructeurs selon l’article 1792 et alinéas suivants du code civil

La garantie court à partir du terme de la première année suivant la réception des travaux (procès-verbal de réception faisant foi), elle prend ainsi la suite de la garantie de parfait achèvement et prend fin au terme de la garantie décennale.

Ainsi peut-on dire que le système français est un système « à double détente » :

  • L’assureur dommages ouvrage indemnise le propriétaire dans des délais et conditions fixés par les clauses types ;
  • L’assureur dommages ouvrage exerce ensuite des recours contre les constructeurs responsables et leurs assureurs en responsabilité décennale.

Ce système permet une indemnisation rapide du maître de l’ouvrage et assure une protection efficace du consommateur.

Nom de la garantie

Souscripteur

Bénéficiaire

Objet de la garantie

Point de départ de la garantie

Durée de la garantie

Garantie de parfait achévement

constructeur

Maître de l’ouvrage

Tous types de désordres

PV de réception des travaux

1 an

Garantie de bon fonctionnement

Tous les constructeurs d’ouvrage

Maître de l’ouvrage

Vices concernant les équipements non apparus lors de la réception

PV de réception des travaux

2 ans

Garantie décennale

Tous les constructeurs d’ouvrage

Maître de l’ouvrage

Vices et désordres affectant la solidité ou l’usage normal de l’ouvrage

PV de réception des travaux

10 ans

Assurance dommages ouvrage

Maître de l’ouvrage

Maître de l’ouvrage

Tous vices et désordres affectant l’ouvrage

Terme de la 1° année suivant la réception des travaux

9 ans